De ces femmes que nous aimons
Ames impassibles dans vos corps sublimes
Vous nous faites aimer la vie comme la mort
Ses passions, ses bonheurs, ses tristesses infimes
Comparés aux magnifiques sujets de nos efforts
Si nos fantasmes sont des plus criticables
Et nos qualités malheureusement rares
Vos charmes et votre douceur n'en sont que plus louables
Laissant libre champ à nos plaisirs épars
Nous puisons en vous nos forces, notre sourire
Vous, tendres déesses de notre monde
Qui nous faites aimer, jouir et souffrir
Et qui nous tolérez, nous, bêtes immondes
Limpides et charnelles sont nos envies
Sur vos corps nous jetons notre dévolu
Sur nos coeurs vous avez suprématie
Ainsi de notre amour nait la vertu.
Similibibi, alias Thibault, Paris, 2005
______________________________
Monologue
Ainsi son amour pour moi n'est plus. Son coeur s'est tourné vers d'autres horizons et je n'ai pu, magré mes efforts les plus insensés, rattraper ses sentiments dans leur fuite. Ô paysage ingrat aujourd'hui, toi qui fut Eden hier, pourquoi as-tu changé de face en ce funeste jour? Si je n'ai pas toujours été le plus vertueux des hommes, j'estimais cependant ne l'avoir pas blessée. J'ai tout vendu, tout quitté pour mieux servir son amour. Ô destin cruel, tu m'ouvres aujourd'hui les yeux. Je fus sans doute bien présomptueux de penser que son bonheur suffirait au mien et j'agissais de sorte que mon bonheur devait suffire au sien. La vie est bien terne pour les amants éconduits dont la passion ne s'efface point.
J'ai tout bravé pour elle, vents et marées, bandits et escrocs, périls et blessures, mers et océans. Je me sentais intouchable, indestructible, une simple pensée tournée vers elle et le sang affluait en moi, me rendant capable des plus grands exploits. Aujourd'hui il n'en est plus rien. La vie me quitte irrémédiablement. La blessure en mon coeur est irréversible, je perçois mon sang qui circule moins vite, mes veines et mon coeur, encore gros et palpitant hier, ne sont plus que l'écho lointain d'émotions à jamais perdues. Je n'aurais pas besoin d'aller au devant de la mort, la vie me quittant peu à peu, elle viendra me saisir au moment qu'elle jugera le plus opportun. La plus grande des douleurs physiques ne suffirait pas à palier l'insatiable douleur qui sévit en mon coeur.
Ô âmes damnées de la passion, vous qui avez vécu comme moi ces pénibles instants, donnez-moi la force de vous rejoindre dans l'au-delà. J'ai connu les fastes de l'amour, le bonheur absolu d'aimer et de l'être en retour. La chute n'en est que plus abrupte et la réception plus mortelle. Ô flammes de l'enfer, retirez vos langues acérées, retournez dans les entrailles de la Terre, celle qui vous ont vu naître. Je ne suis pas celui que vous recherchez, je ne suis pas le traître de mes sentiments, laissez moi reposer dans la paix de l'éternel.
Toi que j'ai aimé, entends les derniers souffles de ma litanie. Tu m'as appris la vie, tu me la reprend, après tant de temps passé côte à côte. J'en appelle à tous les esprits des morts, vous, seuls témoins de de notre passion, pouvez juger de mes bonnes intentions.
Hélas il est bien tard déjà. Le froid a engourdi mes membres, le Soleil s'est couché, une nuit sans lune prend place dans le ciel étoilé. L'obscurité gagnant le paysage gagne aussi tout mon corps. Je me sens partir, je me sens glisser vers ce monde inconnu et effrayant. Je t'aurai aimé jusqu'au bout, sans le moindre doute."
Similibibi, alias Thibault, Paris, 2005